Elle joue un rôle essentiel dans l’alimentation des enfants, mais aussi dans leur éducation
Le Centre National de la Fonction Publique Territoriale m’a demandé de créer un cycle de webinaire sur l’alimentation. J’ai organisé de nombreux webinaires dont les thématiques et contenus peuvent intéresser un large public.
A la fin de cet article, vous trouverez un lien pour visionner l’enregistrement du webinaire où Mohamed Merdji, sociologue, professeur émérite à Audencia Nantes, nous explique les rôles fondamentaux que joue la restauration scolaire en France.
Contrairement à ce que l’on entend fréquemment, la cantine est très appréciée des enfants. Les enquêtes montrent que 80% d’entre eux apprécient leur restaurant scolaire. Même si elle n’est pas parfaite, elle joue un rôle social, de prévention mais aussi d’éducation alimentaire.
En 1936 elle devient obligatoire. Des cantines scolaires existaient déjà mais de manière disparate sur le territoire. L’objectif était d’offrir un repas aux enfants qui venaient à l’école parfois de très loin. Ainsi, les enfants pouvaient suivre la classe sans avoir besoin de repartir manger chez eux. A cette époque, c’était aussi une action qui visait à favoriser l’école laïque et la scolarisation des enfants de paysans. Les enfants avaient à leur disposition soit une salle de classe, soit un réfectoire où ils pouvaient manger le repas qu’ils avaient apporté. Mais un repas chaud pouvait aussi leur être servi.
Actuellement, la cantine continue de jouer un rôle social. Elle fournit souvent le seul repas équilibré de la journéepour les enfants des familles les plus modestes.
En effet, elle joue un rôle très important dans la prévention du surpoids et de l’obésité. Une étude réalisée en 2013 chez près de 8000 enfants français a montré que la fréquence des repas pris à la cantine est l’un des principaux facteurs de protection contre le surpoids et l’obésité.
C’est un lieu où on sert tous les jours aux enfants un repas varié, nutritionnellement équilibré, sans écran ni boisson sucrée. Et tous ces facteurs limitent les risques de prise de poids tout en donnant de bonnes habitudes aux enfants.
Les scientifiques se sont longtemps concentrés sur le contenu des assiettes consommées par les enfants. L’équilibre nutritionnel des repas est longtemps resté le seul facteur considéré comme important. C’est bien sûr le cas, mais ce n’est pas le seul facteur. Il faut aussi regarder où et quand on mange.
C’est ainsi que des études ont souligné l’importance :
Une méta-analyse américaine de 17 études sur 180 000 enfants a regardé s’il y avait un lien entre la fréquence des repas en famille et la santé des enfants et adolescents. Les résultats montrent que plus la fréquence des repas pris en famille et cuisinés est élevée, meilleures sont la corpulence et la qualité nutritionnelle de l’alimentation des enfants et des adolescents.
C’est aussi à la cantine que les enfants apprennent les règles du « bien manger », ensemble de règles et d’habitudes qui définissent en grande partie le repas familial français. C’est-à-dire :
Nos cantines permettent de découvrir des plats et aliments qui ne sont pas forcément consommés à la maison. C’est un lieu qui participe à l’élargissement du répertoire alimentaire des enfants.
En France, la cantine permet un temps social lors du repas :
En Grande Bretagne, la restauration scolaire est un service avec uniquement la mise à disposition d’un endroit où manger :
Comme le montre la courbe ci-dessous, 54% des Français sont en train de manger à 12h30 et le temps qui rassemble le plus de Britanniques est 13h10 avec seulement 18% d’entre eux. La courbe rouge montre qu’il n’y a pas réellement d’heure de repas en Grande Bretagne. Mais plutôt des temps de repas personnels en fonction de l’emploi du temps.
La courbe ci-dessous compare les horaires de prises alimentaires des enfants entre la France et la Grande Bretagne. En France, en bleu, on observe 4 pics dont 3 très bien identifiés, contrairement à la Grande Bretagne, en rouge, où les temps de repas sont plus diffus car il n’y a pas de réelle pause pour le déjeuner. Comme les adultes, les enfants mangent quand ils ont le temps. Ces temps diffus ne permettent de se retrouver ensemble autour d’une table.
Comme on l’a vu, la restauration scolaire développée en France apporte beaucoup de bénéfices à nos enfants, tant en termes d’aliments proposés que l’organisation du temps social. Ainsi, cette institution permet d’ancrer notre modèle alimentaire qui s’avère protecteur pour la santé au-delà de la nutrition. Elle joue aussi un rôle social essentiel permettant aux enfants de manger un repas équilibré quel que soit leur milieu social.
Malheureusement, le personnel des cantines n’a pas toujours conscience du rôle très important d’éducation qu’il joue. Ce métier est sous-évalué. Les personnes sont souvent peu diplômées et reçoivent très peu de formation en dehors des aspects techniques et de sécurité alimentaire. Alors que des enquêtes et tests que j’ai fait avec l’Institut Danone montrent un vrai intérêt pour ces questions de la part du personnel.
Suite à ce constat, j’ai conçu Clémantine (Clés pour une meilleure alimentation à la cantine) pour l’Institut Danone avec la participation du CNFPT. Il s’agit d’un programme de formation qui permet au personnel de la cantine scolaire, mais aussi des animateurs, d’acquérir des connaissances sur les besoins des enfants, le développement de leur goûts, etc. Mais, cette formation donne aussi des clefs pour améliorer les pratiques et aider les enfants à goûter des aliments nouveaux par exemple.
Cette formation a été testé dans 4 villes pilote et il ressort qu’elle :
Comme on le voit, notre cantine est une institution qui joue un rôle clef dans la santé et l’éducation de nos enfants. Mais nous pourrions aller plus loin pour de l’école et de la cantine des lieux d’éducation alimentaire pour tous. C’est ce qu’a démontré l’étude Educ’Alim qui a fait l’objet d’un de mes précédents articles de blog.
Sources